Selon une nouvelle analyse, le financement climatique de la Suisse reste bien en deçà de son potentiel

16 Mai 2025

Alliance Sud et Caritas critiquent la Suisse : pour le cadre mondial de financement climatique, Berne doit au moins tripler sa contribution et trouver de nouvelles sources de revenus.

Peu avant la décision attendue du Conseil fédéral sur le montant futur du financement climatique suisse, Alliance Sud et Caritas Suisse présentent une analyse commune. Les deux organisations y évaluent les engagements pris par la communauté internationale lors de la Conférence sur le climat COP29 qui s’est tenue à Bakou en novembre 2024. À cette occasion, les États se sont engagés à porter leur soutien à la protection du climat et à l’adaptation aux changements climatiques dans les pays du Sud à un total de 300 milliards de dollars par an d’ici 2030. La Suisse a « accepté d’apporter sa contribution », rappelle le communiqué, mais l’engagement actuel n’est pas suffisant.

Selon les calculs des ONG, la Confédération devrait prendre en charge au moins 1 % du nouvel objectif total, soit environ 3 milliards de dollars par an. « La Suisse a un double intérêt à protéger le climat mondial : elle est touchée de manière disproportionnée par le réchauffement climatique et a besoin d’un multilatéralisme qui fonctionne », déclare Delia Berner, experte en climat chez Alliance Sud. Or, jusqu’à présent, plus de 90 % des fonds suisses consacrés au climat proviennent des budgets de la coopération internationale. « Continuer à financer ces contributions sur le dos de la coopération au développement ne fait qu’aggraver les crises mondiales », poursuit Delia Berner.

Caritas Suisse a examiné les flux financiers réels pour les années 2021 et 2022 et constate, selon son communiqué, des lacunes considérables. D’une part, le volume est insuffisant, d’autre part, l’accès aux fonds reste difficile pour les populations locales dans les pays les plus pauvres. Il est particulièrement problématique que la Suisse comptabilise des investissements privés qui, dans la pratique, n’arrivent guère là où ils sont nécessaires. « En prélevant plus de 90 % des fonds destinés au financement international de la lutte contre le changement climatique sur le budget déjà limité de la coopération au développement, la Suisse affaiblit la lutte contre la pauvreté dans les pays du Sud », explique Angela Lindt, responsable de la politique de développement et du climat chez Caritas.

Dans son document « Klimafinanzierung – jetzt erst recht » (Financement climatique – maintenant plus que jamais), Alliance Sud demande que les recettes supplémentaires soient systématiquement générées selon le principe du pollueur-payeur. Cela inclurait, par exemple, des taxes sur les secteurs économiques particulièrement émetteurs. C’est la seule façon pour la Suisse d’apporter sa « juste contribution » tout en évitant que des fonds destinés à la lutte contre la pauvreté ne soient réaffectés.

Les ONG soulignent que les températures ont déjà dépassé les 40 degrés Celsius dans certaines régions de l’Inde en avril, soit « cinq degrés de plus que la moyenne annuelle ». Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, le risque d’un blocage de la politique climatique augmente, mais « nier la crise climatique ne la fera pas disparaître ». Il est donc d’autant plus important que les petits États riches comme la Suisse envoient un signal clair. Alliance Sud et Caritas exigent à l’unisson que Berne présente, au plus tard à la fin de l’été, lorsque le Conseil fédéral rendra sa décision, des mesures concrètes pour atteindre l’objectif de financement climatique de trois milliards de dollars par an d’ici 2030.