Souvent invisible, la violence psychologique n’épargne pourtant aucun milieu social, dans notre pays également. Plus de 250 organisations ont tenté cette année encore d’attirer l’attention sur ce fléau. Pour le combattre, une modification du code pénal est en cours en Suisse. Les Églises sont aussi actives sur ce thème et différentes paroisses ont participé à la campagne de prévention.

Présente dans toutes les formes de violence, la violence psychologique est largement méconnue en tant que telle. Elle s’inscrit dans la spirale de la violence domestique et constitue la forme de violence la plus répandue dans les relations conjugales. Plus de 40% des femmes en Europe sont concernées par des violences psychologique. Près de 20% des femmes ont été stalkées (harcelées de manière obsessionnelle) au moins une fois dans leur vie. Et près de 60% des personnes LGBTQIA+ ont été victimes de harcèlement.

Durant 16 jours cet automne, une campagne de prévention a été menée dans toute la Suisse, entre le 25 novembre, Journée internationale contre la violence à l’égard des femmes, et le 10 décembre, Journée internationale des droits humains.

« Cette campagne, qui est organisée depuis 16 ans en Suisse alémanique, est la plus grande en Suisse. En l’étendant aussi à la Suisse romande et italienne, nous avons pu sensibiliser l’ensemble de la population et envoyer un signal fort et uni contre la violence », explique Isabelle Vidal, responsable de la campagne de Frieda – L’ONG féministe pour la paix.

Dans toute la Suisse, plus de 250 organisations ont organisé durant les 16 jours de campagne plus de 200 événements et actions pour attirer l’attention sur la forme la plus fréquente de violence basée sur le genre. Pour la première fois, la campagne a été étendue cette année à la Suisse romande et au Tessin afin d’augmenter l’impact de cet événement.

Pour cette première édition latine, une trentaine d’organisations ont répondu à l’appel, avec des expositions, des pièces de théâtre, des conférences, des rassemblements, des projections de films et des débats. « Cela a permis de faire entendre une thématique importante, dans toutes les régions romandes, à travers des formats différents ».

Les mises en réseau nées de ces événements seront utiles à la prochaine campagne de l’organisation et des paroisses de Suisse romandes sont intéressées par cette thématique.

Difficile à identifier

En Suisse, la violence psychologique reste toutefois difficile à identifier et à reconnaître, même pour les victimes, explique encore Isabelle Vidal. Souvent remises en doute, dénigrées et isolées, les personnes qui réussissent finalement à demander de l’aide professionnelle rencontrent des obstacles supplémentaires. En effet, la violence psychologique ne constitue pas une infraction pénale en soi. Les centres d’aide et les services spécialisés se voient ainsi souvent limités dans leur offre de soutien, notamment financière.

Afin de prévenir et lutter contre la violence psychologique, des revendications communes aux différentes organisations qui ont participé à la campagne ont été élaborées, dont une modification du Code pénal qui incorporerait une infraction spécifique au harcèlement obsessionnel, ou stalking en anglais. Cette modification est en cours afin que les incidents en ligne et hors ligne puissent faire l’objet d’enquêtes, de poursuites et de sanctions.

Les organisations participant à la campagne ont également demandé l’accès et l’accompagnement garantis des centres d’aide aux victimes et autres services spécialisés pour les victimes de violences psychologiques, ainsi que des mesures de formation et de sensibilisation sur ce type de violences et une approche centrée sur la victime.

Enfin, elles demandent la collecte de données et des études sur cette thématique afin de développer la recherche et des mesures efficaces pour observer la prévalence de ce phénomène en Suisse. Il s’agit aussi de prendre des mesures pour minimiser l’impact des procédures judiciaires sur les victimes, qui doivent souvent répéter leur histoire à des dizaines de reprises, ravivant ainsi de douloureux traumatismes.

Le rôle des Églises

Les organisations poursuivront à l’avenir ce travail de prévention et de sensibilisation. Il reste essentiel de lancer le débat public afin de connaître l’ampleur de ces violences et de prendre des mesures efficaces. Le manque d’égalité et les rapports de pouvoir inégaux sont le terreau de la violence de genre et ont pour effet de la minimiser et de la banaliser.

« Prévenir la violence est l’affaire de l’ensemble de la société,», déclare Isabel Vidal. C’est pourquoi, les Églises sont aussi concernées. Aucun contexte social n’est en effet épargné, tout le monde doit s’impliquer, note la responsable. « Les paroisses peuvent donc jouer ce rôle d’être des modèles, et de porter cette sensibilité au sein de leur propre communauté ».

Chaque année, plus de 150 organisations prennent la parole en public en Suisse pour lutter contre la violence basée sur le genre. La campagne “16 jours contre la violence de genre” a lieu au total dans 187 pays du monde entier.